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Dossier de Presse

 

Dossier de presse / Topiques

 

 

AVANT-PROPOS

 

Topiques est une pièce pour quatre comédiens et une quinzaine d’objets accompagnés de projections. Il s’agit de proposer 15 possibilités d’actions et de paroles dans un espace-temps donné.

 

Topiques présente quatre individus, AM, JL, J et M, deux hommes et deux femmes. Les lettres L, JL, M et AM correspondent aux initiales de leurs prénoms.  

 

Les performeurs constituent la matière première de la pièce, leurs corps, leurs voix sont les révélateurs d’un théâtre d’images, à la fois sur scène et dans la tête du spectateur.

 

AM, JL, J et M parlent, bougent, produisent des bruits, s’aiment, observent les choses, racontent leurs rêves et tentent de capter l’instant ou de se projeter dans l’avenir. Ils se trouvent dans un temps à part où les mots, les regards, les sons, les espaces, mouvants, opèrent comme des prismes qui transforment continuellement la perception du présent. 

 

Ensemble ils transforment la scène en une cabine mentale ou cabine photographique, lieu où ils « font l’image » , espace abstrait et concret à la fois. 

 

Le texte (monologue, dialogue, polyphonie) se superpose à l’action réelle et aux objets réels de manière à créer une sorte de dédoublement du présent.

 

Le spectateur est face à un lieu intime où tout se révèle de matière fragmentaire, comme l’émiettement d’une journée ou comme la reconstitution-collage d’une histoire.

 

  Dans ce projet j’aimerais développer une écoute mutuelle des spectateurs et des comédiens pour que chaque chose apparaisse dans une grande netteté. 

 

Il s’agit au travers des topiques de créer des espaces illusoires.

 

Les quinze objets, les projections, les sons viennent se croiser comme des assemblages ou des formules algébriques ou encore comme « la rencontre fortuite d’un parapluie et d’une machine à coudre sur une table de dissection » . 

 

Ces combinaisons servent d’ouvroir à l’imaginaire.

 

DESSINS PREPARATOIRES

 

 

Note d'INTENTION

 

Topiques tente d’ouvrir une réflexion sur le rapport à l’autre, au temps et à l’objet.

 

Après avoir travaillé sur un langage poétique et une forme chorégraphique très précise accompagnée de musique et de projection de photographies dans Les Essoufflés, j’avais cette fois-ci envie d’ouvrir davantage les potentialités du temps réel.

 

 Les Essoufflés est une pièce très formelle inspirée à la fois de l’oeuvre de Samuel Beckett et des chorégraphies d’Anne Teresa de Keersmaeker et de Cindy Van Acker. Les chorégraphies des Essoufflés ont été créé collectivement pendant les répétitions et à partir de dessins et schémas que j’avais réalisé au préalable.

 

Dans Topiques je souhaite créer un dialogue entre J, M, AM, JL, l’espace et les objets dans un continuum.

 

Le texte est très séquencé, il s’agira durant les répétitions de trouver des rythmes différents tout en créant une fluidité entre les modules c’est à dire de trouver l’organicité de Topiques.

 

J’ai fait le choix de travailler avec quatre acteurs d’âges différents, une jeune femme et un jeune homme (d’environ 25 ans) et un couple d’âge mures (60-70 ans) avec une présence très forte, très caractéristique. La phase de création sera véritablement une phase d’expérimentation avec les comédiens à partir du matériau textuel et didascalique de Topiques. Il s’agira de développer un jeu de dialogue, dédoublé, en écho. 

 

Dans ce projet, les recherches se construisent à partir d’un réseau de références à l’art contemporain   au travers de différents médiums ; installation, vidéo, performance, sculpture, (Bruce Nauman, Joseph Beuys, Vito Acconci, Laurie Anderson, Marina Abramovic, Robert Morris).

 

Dans un premier temps je souhaite travailler sur la présence des performeurs, (voix, mouvement) très simplement (sans intention). Ce qui m’intéresse d’abord c’est la présence pure des comédiens (conf. citation 3, 4 p. 10). 

 

Le travail avec les objets (exploration de leur potentiel sonore et visuel) se déroulera dans un second temps.

 

Dans Topiques les objets sont hétéroclites et pris dans l’univers quotidien. Ils sont choisis en fonction de leur forme, de leur matière, de leur fonction et de leur charge sentimentale plus ou moins importante. Il s’agit d’une géographie d’objets coexistant dans un espace, à observer, à utiliser, à ranger, à classer. Ils évoquent des univers différents (casque de moto, kärcher, cymbales, bassine), se contredisent et imposent leur présence multiple.

 

Je me réfère ici aux ready made de Marcel Duchamp et plus proche de nous, à des metteurs en scène qui travaillent avec l’objet comme Roméo Castellucci, Pascal Rambert, Philippe Quesne, ou encore le collectif l’IRMAR.

 

Ici les objets envahissent de façon inexplicable la scène. Il s’agit peut-être d’un emménagement ou d’un déménagement, un moment de face à face de l objets d’une vie, des objets dont il faut faire quelque chose.

 

Les objets sont aussi porteurs d’une musicalité, instruments (cymbales, grosse caisse) ou objets métalliques (cafetière italienne, machine à écrire) ou libérant d’autre matière (eau du kärcher).

 

Tout en s’encrant dans le présent par leur présence, les objets s’inscrivent aussi dans une autre temporalité.

 

Tout au long des répétitions sera établie une partition avec l’aide de musiciens (un guitariste et un pianiste) et une bande sonore sera créé pour accompagner certaines projections.

 

Les lumières ainsi que les projections de couleurs ou de vidéos s’inscrivent dans une temporalité élargie. Elles présentent, en dehors de toute chronologie, différents moments de l’évolution des techniques de l’image. Ces vidéos et projections proposent un regard spéculaire entre le plateau, les comédiens et l’objet filmé.

 

Le stroboscope est utilisé au début de Topiques.

Le plateau est d’abord plongé dans le noir, puis éclairé par à-coup doucement, puis progressivement les intervalles de lumières se rapprochent jusqu’à la lumière totale. Le stroboscope permet d’ouvrir l’image scénique.

 

Suivent des projections de bleu à l’aide de gélatines. La notion d’espace abstrait ou d’espace coloré m’intéresse énormément, j’aimerais crée ici un double espace de la couleur et du corps et de la voix. 

 

Les projections de couleurs peintes directement sur la pellicule s’inspirent des films abstraits réalisés de 1910 à 1912 de Bruno Corra et Arnaldo Gina, (futuristes italiens).

 

La projection d’un film tourné avec une caméra super 8 renvoie au début de l’usage de l’image en mouvement dans la sphère publique. Il s’agit de capter des micros mouvements du corps dans un espace naturel en s’inspirant de la gestuelle propre à Anna Karina dans Pierrot le fou de Godard.

 

La projection d’un film numérique de la neige qui tombent au ralentis sur une montagne renvoie à la manipulation de l’image et cite une vidéo installation de Bill Viola, San Juan de la Cruz, 1983.

 

Retracer l’histoire du cinéma en surimpression du plateau (en filigrane) permet de créer un écho avec le texte et les actions qui questionnent le regard sur soi, sur l’autre et le besoin de représentation, cette volonté du devenir image de J, AM, M et JL.

 

 

Après cette brève présentation on peut concevoir Topiques comme un dispositif qui articule texte, objet, images et corps. Le texte de Topiques se présente véritablement comme une partition en attente. 

 

 

CITATIONS

 

« Non pas à proprement parler le volume des choses mais leur sentiment et leur retentissement en moi : le retentissement au bout duquel est la pensée.

Se laisser emporter par les choses au lieu de se fixer sur tels de leurs côtés spécieux, de rechercher sans fin des définitions qui ne nous montrent que les petits côtés

 

mais pour cela avoir en soi le courant des choses, être au niveau de leur courant, être enfin au niveau de la vie au lieu que nos déplorables circonstances mentales nous laissent perpétuellement dans l’entre deux,

être au niveau des objets et des choses, avoir en soi leur forme globale et leur définition du même coup

et que les localisations de ta substance pensante entrent en branle en même temps que leur sentiment et leur vision en toi. »

Antonin Artaud, L’ombilic des limbes. Paris : Gallimard, 1927-1968, p. 176.

 

« Faire sans cesse l’effort de penser à qui est devant toi, lui porter une attention réelle, soutenue, ne pas oublier une seconde que celui ou celle avec qui tu parles vient d’ailleurs, que ses goûts, ses pensées et ses gestes ont été façonnés par une longue histoire, peuplée de beaucoup de choses et d’autres gens que tu ne connaîtras jamais. Te rappeler sans arrêt que celui ou celle que tu regardes ne te doit rien, n’est pas une partie de ton monde, il n’y personne dans ton monde, (...). Cette exercice mental (...) te conduit à la plus grande jouissance qui soit : aimer celui o u celle qui est devant toi, l’aimer d’être ce qu’il est, une énigme — et non pas d’être ce que tu crois, ce que tu crains, ce que tu espères, ce que tu attends, ce que tu cherches, ce que tu veux. »

Christian Bobin, Autoportrait au radiateur. Paris : Gallimard, 1997, p. 84-85.

 

«Pour qu’un jeu d’acteur soit intéressant il faudrait que l’acteur existe et qu’il fasse percevoir la conscience qu’il a d’exister.

Mais, à la fois, il faudrait qu’il trouve le moyen de sentir — et faire sentir — sa part d’inexistence.

Sentir et faire sentir qu’il est et qu’il n’est pas.

Et de même, dès qu’il parle, devrait être perçue cette impossibilité apparente : faire entendre un sens mais — dans le même mouvement — faire entendre un sens contraire.

Ou plutôt faire à la fois entendre les échos, par les sons et par les rythmes, de plusieurs sens. Voire d’une infinité de sens. »

Claude Régy, La Brûlure du monde. Paris : Les Solitaires intempestifs, 2011, p. 25.

 

« Le théâtre a besoin de la mentalité de l’art de la performance. 

Cette mentalité érodera la frontière entre illusion et réalité (...)

Le théâtre c’est de la perspective.

Le théâtre c’est de la mise en scène.

Le théâtre ce n’est pas jouer quelque chose.

Le théâtre c’est déterminer de quel point de vue il faut regarder. »

Jan Fabre, Journal de nuit (1978-1984). Paris : L’Arche, 2012, p.69-70.

 

Bibliographie 

 

ARTAUD Antonin, L’ombilic des limbes. Paris : Gallimard, 1927-1968.

BOBIN Christian, Autoportrait au radiateur. Paris : Gallimard, 1997.

BECKETT, Samuel, L’image. Paris : Les éditions de Minuit, 1988.

FABRE Jan, Journal de nuit (1978-1984). Paris : L’Arche, 2012.

GOLDBERG Roselee, La performance du futurisme à nos jours. Londres : Thames & Hudson, 1988, 2001. 

LAUTREAMONT, Les chants du Maldoror (chant VI). Paris : José Corti, 1938, (première édition, Édition Genouceaux, Paris, 1890).

PEREC Georges, Les choses. Paris : René Juliard, 1965.

PEREC Georges, Un homme qui dort. Paris : Denoël, 1967.

PEREC Georges, Espèces d’espaces. Paris : Galilée, 1974.

REGY Claude, Espaces perdus. Paris : Les Solitaire intempestifs, 1998.

REGY Claude, L'état d'incertitude. Paris : Les Solitaire intempestifs, 2002.

REGY Claude, La Brûlure du monde. Paris : Les Solitaires intempestifs, 2011.

GOUMARRE, Laurent, Rambert en temps réel. Paris : Les Solitaire intempestifs, 2005.